PÉNINSULE DU YUCATAN 3ème post (suite - cause bug de Journo)

Au-dessus du Cenot de Moy-Zhon

23 JANVIER, MAHAHUAL

On quitte Angel qui est en train de tisser un hamac. Il a l’air d’avoir le coup de main. Nous choisissons de vivre une dernière aventure sur la péninsule avant de changer d’Etat. Il y a énormément de choses à voir dans le Yucatan, on pourrait y passer nos 3 mois de roadtrip si on voulait. Mais honnêtement, dans ces conditions de Covid où les gens sont particulièrement psychos dans cette zone touristique, et en plus sans voiture, c’est dur de profiter de la péninsule. En fait il faut être mobile pour bien profiter de la péninsule, Scooby nous manque! On a bien pensé à acheter une voiture pour la revendre après, mais impossible pour les étrangers avec un visa de tourisme. Impossible aussi d’aller aux States en acheter une et de revenir avec, puisque les Français n’ont pas le droit d’entrer aux US, toujours cause covid. Côté spéléo c’est dur d’avoir des infos dans le Yucatan, le club ne sort pas \240cause Covid, donc ça nous demande du temps de rassembler toutes les infos, hors le temps cours ! Le choix est dur, il y a bcp d’endroits que nous aimerions voir : les îles tout en haut comme Holbox, ou la mer à côté de Merida, ou encore les plus vieilles ruines du Mexique à Cakmuluk (-600ans), perdues dans la jungle. Mais il y a aussi cette réserve naturelle de Sian Kan où nous voulions aller en vélo quand nous étions à Tulum. Elle regorge d’animaux sauvages comme le jaguar, les crocodiles, les tapirs, les singes et une multitude encore ... Enfin il y a la plongée sur le Banco Chinchorro, sur la deuxième plus longue barrière de corail au monde, et c’est ce choix que nous faisons. Nous nous retrouvons donc en plein cagnard, au bord d’une nationale, à attendre un bus qui nous emmène à nouveau de l’autre côté de l’île. Le trajet est plutôt turbulent : un tricycle moto qui nous voit et pense bien faire en venant nous chercher pour nous emmener ailleurs où nous aurions plus de chance d’être pris. Mais en plein déplacement à bord de notre tricycle un bus passe en sens inverse, le tricycle fait des signes et des appels de phare, le bus s’arrête, on saute de l’autre côté puis à bord du bus qui nous emmène à un petit bled 1h plus loin. On monte dans un plus gros bus qui nous abandonne 3h plus loin à un croisement. Entre temps un vendeur ambulant monte à la sauvette dans le bus pour nous vendre de mystérieux mais délicieux Quili / Kiri ou Qiri ? Je ne retrouve pas le nom mais ces galettes de blé complet roulées et grillée, d’inspiration arabe à priori, et fourrées aux petits oignons, ciboulette et piment, nous ont redonné vie ! En plus, c’est un des rares « antojito » (snack) végétarien. Au croisement un bus nous récupère rapidement pour arriver à Limones, où nous apprenons que le dernier bus pour Mahahual (notre destination), est parti à 18h.

« A 18h? » s’étonne Charlie qui ne perd jamais le nord «  mais il est 17h57! ». « Non, il est 18h57 » répond le taxiste.

Ah oui c’est vrai, on a changé d’Etat. On s’était déjà fait avoir dans l’autre sens, il y a un changement d’horaire. Après négociation, un taxi nous emmène à destination, à 45min de là. Pas le choix, on a eu beau quémander à Limones, personne n’a voulu nous héberger (il n’y a pas d’hostal ou équivalent). On a donc cédé à l’offre du taxi : il nous emmène à Mahahual pour 400 pesos. C’est hors budget mais au moins on avance. On atterri dans une cabaña Airbnb assez hallucinante, propriété de Mexicains bourgeois tout aussi excentriques. Ça ira pour cette nuit. On se requinque au bar du quartier, tenu par des Ricains et on fini à la pizzeria d’un italien. C’est cosmopolite le coin. Assez loufoque cette journée.

Le mystérieux Kiri en forme de pomme de pin

Marché de village

24 JANVIER, MAHAHUAL

« Non, désolé il y a trop de houle on ne sort pas en mer avant ... pas demain... pas après demain ... mercredi ça souffle encore plus ... ah jeudi ça commence à être mieux. Vous serez encore là ? »

Charlie et moi nous regardons : il est temps d’agir. « Peut être » répondons-nous en quittant la boutique, pris au dépourvu. On est dimanche, on ne comptait pas s’éterniser ici non plus.

« J’ai besoin de NATURE ma chérie, j’en peux plus de tout ces gens qui veulent nous vendre des trucs, de dépendre de tous le monde pour dormir, petit déjeuner, déjeuner dîner, ils nous prennent par la main même pour aller pisser c’est ooooopressant! ». On est sans cesse hellés, on est vus comme des poches à fric. Eh oui, j’entend bien. On a besoin de retour aux sources, surtout nous qui avons l’habitude de vivre seuls, en nomades. Alors nous prenons la décision de partir marcher et camper, jusqu’à ce que le vent se calme. En 2-2 on a refilé nos gros sacs aux mexicains bourgeois excentriques de la cabane, et nous voilà piétons avec chacun notre mini sac de spéléo qui nous sert de sac à dos : ça c’est du light. Mais en vrai il fait tellement chaud ici qu’il n’y a pas besoin de grand chose. On a pris 6L d’eau (il fait hyper chaud et humide), la tente, le maillot de bain, une petite serviette qui servira de couverture, le réchaud et de la nourriture pour 3 jours. On a aussi trouvé une machette vendue brute et une pierre à aiguiser. On compte marcher par le littoral jusqu’à la pointe de cette langue de terre qu’est Mahahual (80km), à la pointe etrouver un pêcheur qui nous emmène à la réserve de Sian Kan, ou rentrer en stop (il y a une route dans les terres). Le plan paraît chouette, j’ai un peu la frousse des crocodiles qui habitent les lagunes que nous allons longer mais Charlie est tellement heureux de partir!

Dès le départ nous nous confrontons à un obstacle inattendu : les complexes hôteliers privatisent les plages en bétonnant des murs immenses qu’il est impossible de franchir. C’est écœurant, hallucinant. Encore heureux qu’en France tout le littoral est protégé de la privatisation, je haie ce système. On fait un détour de ouf par la forêt, on passe « illégalement » mais discrètement dans une propriété privée et rejoignons la côte où nous sommes liiibres! On marche un long moment sur un côté calcaire plate et bien écorchées qui torture nos grosses chaussures. Ça a dû être un beau lapiaz plein de grotte quand la mer était 150m plus bas.

« Beurk c’est écœurant tout ce plastique » constatais-je avec dégoût. « Punaise mais y’en a partout il ne vont pas nous lâcher ces humains » s’exclame Charlie en ramassant de temps à autre un objet intriguant. On passe sur une site de reproduction des tortues, une belle petite plage, elle aussi est recouverte de plastique. Elles font comment ces tortues pour enterrer leurs œufs ? Un panneau demande « Zone de protection, respectez ce site de reproduction des tortues ». Pffff, tu parles d’une protection. Nous continuons malgré tout notre marche, on en a besoin.

Cric crac croc

J’ai du mal à admirer la beauté du paysage, ces plages de plastique me hante, je suis horrifiée.

On continue

Cric crounch crook

« Les crocs les plus populaires sont définitivement les noires » annonce Charlie, au terme de ses statistiques.

Quand on peut on prend des pseudos sentiers en forêt, ça repose les yeux de voir du vert et moins de plastique (il y’en a quand même, avec le vent ils s’envolent). En frôlant une branche, deux chauves souris s’envolent en plein jour et nous chatouillent. Elles ne font jamais ça en France. Notre réserve d’eau descend à grande vitesse et Charlie commence à avoir un petit creux. En un rien de temps mon aventurier grimpe à un palmier, fait tomber une noix de coco et l’épluche avec sa machette. Mmmmh c’est bon ce jus. Un peu piquant au début mais bon. Il y a pas mal du jus dans une noix de coco. Le fruit est délicieux, ça a un petit goût de noisette, rien à voir avec les copeaux ou les bounties, que je n’aime pas d’ailleurs. On n’en laisse pas un morceau. De jolis papillons tachetés nous distraient, ainsi qu’une empreinte d’animale énigmatique dans la boue, et nous retrouvons notre littoral de déchets. Et le pire c’est qu’on sait que c’est rien ces étendues de déchets. Comment doit être le 7eme continent ?

Le maître de la Coco aiguise sa machette avant de lui couper la tête

Empreinte mystère ?

Le littoral

On passe l’exurgence d’une lagune en équilibre sur un tronc d’arbre. Elle se jette dans la mer et noirci l’eau du littoral. Il y a des minis-poissons-crayons qui jouent dans le courant avec quelques crabes. Le soleil se couche, y’a plus le choix, il va falloir camper sur une plage remplie de déchets. Eh oui, on y a cru jusqu’au derniers rayons de soleil qu’une petite crique idyllique pourrait nous attendre... On va même se baigner dans la mer pour rincer un peu cette sueur, heurk. Nos vêtements sont mouillés de sueur eux aussi. On a droit à un joli coucher de soleil entre les palmiers, côté terre. Ça souffle bien côté mer. On monte un pare-vent pour la tente et on creuse un trou pour le feu, qu’on décore de ces gros coquillages qu’il y a par ici. On vire aussi le plastique tout autour du campement - histoire de faire une pause plastique pour la nuit- et dans l’obscurité, on retrouve notre cocon en pleine nature. On a ramené des maïs à griller sur le feu, Charlie innove une cuisson à l’étouffée dans leur propre bogue de ces jolis maïs, c’est très réussi! Sur la plage des millions de yeux se reflètent dans nos frontales, ce sont des millions de petites araignées. Elles sont rigolottes. Dans les herbes des lucioles scintillent comme des petits phares en de brillant flashs alternés, on dirait qu’elles font du morse. La pleine lune fait un très beau hallo et on y voit comme en plein jour. J’oublie le temps d’un soir que les crocos sortent des lagunes pour aller manger en mer parfois et nous dormons d’un seul trait.

Le campement

Marche sur le littoral

25 JANVIER, MAHAHUAL

Dommage qu’à notre réveil ces déchets soient toujours là ! Mais mon amoureux me souhaite un joyeux anniversaire de couple en m’ouvrant une noix de coco pour le petit déjeuner, que demander de plus ! Après quoi nous nous remettons en route de bon matin et rapidement traversons plusieurs « propriétés privés » qui sont en fait des pauvres baraques de bois avec clôture jusqu’à la mer. Ils n’y vont pas de main morte, à tour de rôle c’est fil barbelé, morceaux de verre cimenté en haut des murs, caméra et pitbulls (dans les villes c’est la même crainte)! Qu’est-ce qu’ils ont avec leur propriété privé ici ? C’est harassant. Nous nous retrouvons à détaler devant les chiens qui nous coursent, les proprios nous regardent sans bouger le petit doigt, Charlie en sort sa machette, ça donne des envies de meurtre. On s’arrête à un mur en parpaing qui plonge dans la mer d’un côté, et des chiens qui nous agressent de l’autre. Puis on capitule: on ne va pas marcher 80km dans ces conditions, ça n’a rien d’une retraite spirituelle ! Quelle déception. Dans cette région, la péninsule du Yucatan, qui rapporte 15% du PIB du pays, les mexicains sont vraiment des tas de fainéants qui ne pensent qu’à extraire les richesses de la nature et du touriste, qui sont dominés par la peur, et qui ne savent même pas se baisser pour respecter tout ce que leur nature leur donne toute l’année. On est terriblement déçus. On rejoint une piste et sans avoir à le demander une voiture de ricains retraités nous ramènent 20km en arrière, à Mahahual. Dire qu’ils sont retraités ici, au bord d’une plage immonde, parmi plein d’obsédés de la propriété privée. Comment peut-on avoir envie de ça ? Est-ce qu’eux aussi se sont mis au passe-temps local : fouiller la plage de bon matin pour voir si la mer n’a pas déposé \240qqch d’intéressant ? Ça revient à faire les poubelles..

« Vous devriez plutôt marcher vers l’autre côté de la langue de terre, vers Xcalak, c’est moins dur ». Un mexicain avec qui nous avions sympathisé nous l’avait aussi conseillé, c’est plus sauvage paraît-il. Alors c’est notre nouvel objectif. Nous nous mettons en marche sur la piste, depuis Mahahual vers le sud cette fois-ci. Une ribambelle de complexes hôteliers privatisent tellement les plages qu’ont ne voit pas la mer, mais au moins on ne voit pas les déchets non plus. Xcalak est à 80km également environ. Les voitures et camionnettes s’arrêtent de temps à autre pour nous faire avancer de quelques kilomètres. On ose piquer une tête au moment du pique-nique avec nos masques : la mer est immonde, les déchets flottent partout dedans-dessus-dessous. On aurait jamais dû regarder. On se hâte de ressortir et de reprendre la piste. Quelques petits animaux nous distraient en chemin : des lézards colorés de toute taille, un gros rongeur et un petit renardeau tricolore pas farouche. Une dernière voiture, encore des ricains, nous amène au terminus : Xcalak.

« Pourquoi vous venez ici ? » nous demandent-ils, intrigués

« On n’aime pas les zones touristique et on a besoin d’être en pleine nature » je répond en anglais

« Eh bien ici, vous serez ravi, il n’y a pas de village plus isolé! » nous dit la femme en nous déposant sur une piste sableuse entre deux cabanes en bois : « On y est! 

Réveil au campement

Noix de coco fraîche

Eh bien ça nous va ! Le hameau de pêcheurs de Xkalak est soigné. Les maisons sont sur pilotis, comme si elles se préparaient à la montée des eaux. Les petits jardins sont entretenus, les murs peints à l’image de la barrière de corail, du travail des pêcheurs. Le lamantin est souvent représenté. Les gens ne sont pas gros, on voit qu’ils sont actifs. Il n’y a pas de déchets dans les rues sableuses, c’est calme. On va sur la jetée, contents d’être arrivés dans un bel endroit, et sommes accueillis par 5 dauphins qui jouent ensemble. Il ne nous reste plus qu’à trouver un logement. On aurait pu camper mais on est tellement dégoulinants qu’on ne pense qu’à une bonne douche. On se met donc en tête de trouver une cabane pour pouvoir se doucher. On se met bien le doigt dans l’œil, les rares hôtels sont des hôtels simples mais aux prix exorbitants (genre 140€/nuit). On désespère, tout le monde nous refuse. On cherche des solutions, on toque aux portes. Les plus petits hôtels sont fermés à cause du Covid. On se retrouve la nuit tombée, à 20h, assis devant un hôtel fermé, sans solution. Quand Pash passe tranquillement en vélo. Il sent bon, il fait pas peur

« Vous cherchez une chambre ? »

« Oui tout à fait! », je me jette sur l’occasion.

« Alors venez voir j’ai une chambre, si ça vous plaît, elle est à vous ».

Charlie le suit de bon pas, moi je clopine derrière. On est sonnés, entre la course des chiens à l’aube, et toute la journée de marche, de poussière de chaleur et de sueur. On a dû faire 20km? Ou plus? C’est pas tant mais ça a suffit pour me faire des ampoules. Je marche pied nus derrière eux.

On rentre dans un petit « négocio » (épicerie de dépanne familiale) en bois, on traverse une cour intérieure, on entre dans un casote en parpaing : la chambre est là, c’est une pièce sommaire, ça sent un peu le moisi, mais y’a un lit, un ventilo et une douche : c’est parfait! En plus Pash nous partage sa cuisine, il y a aussi une douche dans la cour, dont l’eau vient d’un puits « creusé à la main », c’est rafraîchissant. « Ici vous avez le réchaud pour cuisiner et puis quand vous voulez être tranquilles, vous avez votre petite chambre, personne ne viendra vous déranger ici. Il vous faut qqch? Le negocio est ouvert 24h/24 ». En fait Pash dort dans son negocio et se réveille si qqn toque. On prend des œufs, on est hébétés comme des zombis, on se mange une boîte de thon et on se couche. Mais impossible de dormir: je parcours des rues de village pleines de plastique, et c’est sans fin, des déchets, encore des déchêts. Pourtant c’est parti pour 3 jours de bonheur.

L’entrée au village

Dîner chez Pash

26 JANVIER, XKALAK

« Pash on peut te prendre ton kayak? » lui demandais-je, requinquée, le sourire béant, après un bon petit déjeuner d’œufs aux plat, de fromage et de tortillas dans la cour intérieur très agréable grâce à cet énorme arbre qui fait des fruits inconnus.

Pash est un homme assez costaud, avec un gros ventre, une dent en or, et toujours en short de bain, il a l’air de mener son monde et d’avoir du caractère mais il est gentil et il a bon cœur. Il nous loue son kayak 2 places pour un prix dérisoire pour toute la journée (100 pesos) et nous fait le topo : vous pouvez allez à la lagune si vous voulez voir les crocodiles ou aussi aller en mer. Vous avez un masque? Je vous en prête un sinon.

« Et si on va par là » m’enquis-je en pointant dans l’autre direction

« Oui vous pouvez y aller, vous arrivez au canal et au Bélize » dit-il en nous défiant.

C’est à 5-6 kilomètres, même avec ce vent, en longeant les mangroves, c’est possible. Nous voilà pagayant dans cette eau marron et peu profonde, à la limite des mangroves, avec pour matériel un petit couteau, nos masques/tuba et de l’eau. Ça suffit pour partir toute la journée ! On pagaie, on pagaie, on rigole bien, on se sent libres! Personne pour nous dire où aller, personne pour nous mettre en garde de quoi que ce soit, rien que des encouragements, et la confiance de nous prêter ce kayak. Charlie nous cueille deux cocos pour le midi en chemin, qu’il a réussit à décortiquer avec ce petit couteau. 5-6 kilomètres c’est assez loin en kayak de mer mais ça se fait bien. L’eau du canal est magnifique, turquoise et claire, le courant nous emporte rapidement dans la mer intérieure, « La baie des lamantins » qui est cachée dans les terres et abritée du vent. Les couleurs sont magnifiques, l’eau scintille, on s’en donne à cœur joie de plonger dans le courant, de poursuivre les raies, d’admirer les beaux poissons et les coquillages. Pas de lamantins en vue cependant, pourtant on en était pas loin paraît-il.

Dans la cour intérieure, avec un bon café

Arrivés dans la baie des lamantins, entre Mexique et Bélize

27 JANVIER, XKALAK

« Pash, on peut te reprendre ton kayak? »

La veille il n’y croyait pas qu’on était arrivés jusqu’au Bélize!

Cette fois-ci on va faire un tour dans la lagune des crocodiles (pour se reposer les bras un peu). On entre depuis la mer par le cours d’eau marron, nous nous faufilons dans les mangroves comme de vrais aventuriers, les crabes rouges des mangroves se cachent partout dans les racines et se déplacent en équilibre sur les branches, c’est un monde à part, c’est merveilleux, et d’un calme... On débouche dans la lagune sous un envol d’oiseaux échassiers de toutes sortes, mais aucun crocos en vue, que des mouvements suspects. Charlie pagaie et je n’ai qu’à admirer le paysage. Nous ressortons en mer et le kayak nous porte ensuite jusqu’au récif, où nous l’amarrons à une bouée. Charlie plonge pour la première fois dans un aquarium de corail. Je me rappelle de ma première fois, sur la Grande Barrière de Corail en Australie, je croyais rêver. On dirait un monde imaginaire : toutes ces couleurs et ces formes, et la paisibilité d’être dans l’eau. On a beau être assez loin dans la mer ... on a pied. Ça c’est rigolo. En se baladant en kayak on a eu droit au saut de deux raies au dessus de l’eau translucide. Je ne savais pas qu’elles faisaient ça ! Un habitant du village m’a dit que c’était parce que des fois les poissons pilotes les chatouillaient !

Ce soir Dona Silvia fait du poisson au village, quelle veine ça nous fait trop envie de manger le poisson d’ici! On met tout ce qu’il nous reste d’espèces (on en avait pris peu pour notre vadrouille) car demain midi Pash nous propose de rentrer avec lui à Chetumal, la capitale du Quintana Roo, d’où nous prendrons un bus longue distance pour changer d’Etat et nous rapprocher de notre objectif premier : parcourir les grottes et les canyons du Mexique, avec les Mexicains. C’est donc notre dernier soir. On arrive pied nus chez Doña Silvia. Le prix qu’elle indique pour son poisson ne nous permet pas de prendre à boire.

« Le monde ne va pas se terminer demain si vous prenez une agua \240fresca », en se moquant finalement du budget que nous avons. Pour une fois qu’on est pris pour des humains et pas pour des blancs-becs.

Les agua fresca ici sont des jus de fruits pressés et sucrés, rien à voir avec de l’eau. C’est rafraîchissant, plein de vitamines et ça fait voler les papilles!

J’en prend une de pastheque et Charlie goûte le tamarindo, une graine mexicaine dont je me demande comment ils extraient le jus. Par infusion?

Finalement Silvia revient en nous montrant un énorme poisson :

« Je vous fait celui là pour moins cher, parce que c’est vous ». Le prix est dérisoire. « Comme ça vous pourrez vous payez vos petites boissons ». C’est symbolique, car pour le coup on a assez de sous pour tout payer.

On se régale, le poisson est énorme et bien cuisiné, à la braise. On est tellement tranquilles ici, ça donne envie de rester encore. On a pris notre petit rythme à cuisiner chez Pash, à nous doucher dehors, à marcher pieds nus, à siroter notre bière sur le ponton au crépuscule, en regardant les pêcheurs utiliser différentes techniques de pêche.

« Merci pour tout Silvia, il fallait pas... »

«  C’est rien, moi je voulais que vous mangiez bien les enfants » répond la vieille dame, plutôt grande, brûlée par tout ce soleil mais coquette tout de même.

Ça nous fait chaud au cœur de partager la vie de vrais gens.

NOXO de coco chargées, c’est reparti

Dans les labyrinthes de mangrove

Paré à plonger dans l’aquarium de corail

Miam un bon poisson fraîchement pêché

28 ET 29 JANVIER, CHETUMAL

Pash nous prête les vélos ce matin pour que nous puissions aller à une plage publique et propre et profiter une dernière fois de plonger avec les poissons. Ils sont toujours surprenants ces poissons : de toutes les formes, de toutes les couleurs, dans toutes les cachettes. Une raie vient nager devant moi comme pour me dire au revoir alors que Charlie est déjà sur la plage à surveiller les vélos. On croise sur la piste deux beaux serpents : le premier que l’on voit très bien à la tête turquoise ainsi qu’une raie turquoise le long de son corps fin. Charlie l’identifie, grâce à un beau fichier d’inventaires des espèces du Yucatan, comme une couleuvre perico ou « serpent perroquet ». Elle est légèrement venimeuse. L’autre était plus gros et noir, c’était peut être la fin d’un boa! Pash nous conduit comme prévu à Chetumal, à deux heures d’ici, de l’autre côté de la baie des lamantins qui ne ressemble en rien au paradis étincelant vue que nous avons connu de l’autre côté. Sur la route qui rejoint Mahahual nous croisons à 130km/h une tortue qui semble survivre à la fusée et un iguane vert flashy immense qui ne bouge pas d’un poil mais qui mourra peut être d’une crise cardiaque.

Pash nous propose de nous héberger de nouveau chez lui, en moyennant une petit tarif. Son harem de femmes ont l’air toutes tellement contentes de son retour. (les Mexicains ont souvent plusieurs résidences). Alors on accepte, on pose les sacs et partons à l’assaut de la ville en se disant que l’avantage des villes, c’est les bonnes bières et les bons restaurants. Mauvaise pioche pour cette ville de Chetumal qui ne vaut pas l’arrêt. Pourtant les Mexicains en parlent avec fiereté. Le bus pour Tuxtla part le lendemain soir, de nuit. On a toute la journée du lendemain donc pour zoner. On ne veut pas entendre parler de tacos, d’enchilada ou de chilaquiles au petit dej, on veut du vrai café alors on s’assoit sur les convictions de Charlie et on petit déjeune chez Starbucks. Exceptionnellement, il pleut ce matin, ce qui est très favorable à la glande. On va se dégourdir dans un Cenote l’après-midi, qui ressemble surtout à un lac. A la base on voulait voir la lagune de Bacalar, connue pour être une des plus grandes colonie de stromatolites au monde, en plus d’avoir un paysage magnifique, mais les complexes hôteliers privatisent tellement qu’on arrive à peine à apercevoir ce joli paysage. Bref, le Cenote Azul va très bien, avec le masque on peut observer les formations rocheuses, les poissons et les arbres calcifiés, et encore une fois sentir le vertige procuré par ces gouffres noyés. Le soir on est assez chanceux, on trouve un bar à Chetumal avec une belle cour intérieure (mais pas de bonnes bières) et un petit food court pour manger un bon burrito (le meilleur, d’après Charlie). Nous voilà parés pour affronter nos 17h de bus jusqu’à Tuxtla, capitale de l’Etat du Chiapas. Pourtant sur la carte c’est à côté !

Dernier midi chez Pash

Serpent perico sur le chemin

Laguna azul près de chetumal

Quelques bières en patientant le départ du bus à 1h du matin